Nouvelles Voix

Rétrospective : Des espaces qui s’adaptent aux évolutions du monde du travail

Une des clés du succès d’une entreprise réside dans sa capacité à fidéliser, attirer et fédérer des talents qui prendront plaisir à venir travailler au bureau. Proposer des espaces de travail qui soient sources d’inspiration, de productivité et qui reflètent la culture de l’entreprise est PRIMORDIALE.  Mais d’où vient cette pratique et comment la mettre en place ?

Une perspective historique s’avère utile afin d’appréhender les nouveaux espaces de travail d’aujourd’hui.  L’espace bureau a toujours été organisé selon des besoins fonctionnels. Son organisation s’est basée sur le modèle du taylorisme qui se traduit par une division hiérarchique du travail avec des espaces de productions intensifs, des bureaux fermés, individuels ou collectifs selon le degré de responsabilité des occupants.

Un peu d’histoire

À partir de 1958 et jusque dans les années 1970, le modèle d’Henry Ford (automatiser et standardiser les processus de travail) sort des usines pour atteindre les employés des bureaux. Le bureau personnel et sa taille en tant que symbole de statut et insigne du pouvoir a fait son temps et les entreprises veulent que tout le monde travaille dans les mêmes conditions pour atteindre un objectif commun.

On peut voir beaucoup de changement émerger durant ces deux décennies. Dans un premier temps l’apparition des « bureaux-paysagers » (bureaux imaginés comme souples et ajustables, sans cloisons où l’espace est essentiellement destiné à favoriser la circulation de l’information. Ces bureaux en totale rupture avec le modèle domestique).

La future implantation doit permettre d’accélérer la circulation de l’information en rapprochant fréquemment les groupes de travail d’une entité différentes ou non. Ce modèle se répand dans plusieurs pays du monde, on peut voir qu’en Allemagne, le premier « bureau paysager » ouvre chez Bertelsmann à Gütersloh en 1959. Il était composé de murs, de moquettes, de plantes en pot et de bureaux qui sont attribués les uns aux autres selon des critères fonctionnels. L’un des grands avantages de l’époque est sans aucun doute de faire bouger les choses dans des bureaux individuels jusqu’alors rigides. Les échanges sont encouragés et un sentiment de communauté s’est créé.   

Ce modèle fait écho à la valorisation croissante des organisations en réseaux. On commence à observer une transition vers des espaces où les salariés ont en partie le choix de l’usage et de l’emplacement.

Quelques failles…

Mais le « bureau paysager » commence à montrer ses failles. En 1973, Thèves dénonce les limites du « bureau-paysager » “dans un tel espace vous devenez impoli ou (dans le sens ou sinon) vous passez une heure par jour à dire bonjour », les usagers révèlent qu’ils ont difficultés à se concentrer. Paul Sivadon, psychiatre français,  relate ces faits et troubles dans son article L’évolution psychiatrique où il parle de la psychopathologie du travail.

Pour résoudre ces problèmes, les aménageurs réfléchissent dans un premier temps à trouver le juste milieu entre les bureaux cloisonnés, rigides et les bureaux tout ouverts. Ils pensent un espace de bureaux reconfigurables « ni ouverts ni fermés ».  Le salarié bénéficie ainsi d’un espace de travail individuel dans lequel il peut s’isoler tout en ayant accès à l’espace collectif qu’il aperçoit une fois debout.

Et en France ?

C’est dans ce contexte-là que l’on voit apparaître les premières tours de bureaux en France (la première Tour Nobel à La Défense, 1966). Ces nouvelles constructions se basent sur le modèle américain avec des tours plus hautes, plus épaisses, des espaces beaucoup plus vastes, plus lumineuses et surtout sans cloisons !

On parle alors d’open-space. L’open-space semble, dans un premier temps être la solution pour maintenir cette idée de cohésion, de dynamisme entre les collaborateurs et entre les différentes entités. Dans une de ses thèses, l’économiste Alain d’Iribarne directeur de recherche au CNRS et président du conseil scientifique d’Actineo explique que les dirigeants d’entreprises espèrent favoriser le fonctionnement collectif et le travail en équipe. Ce modèle se répand dans toutes les entreprises de la communication « Les vrais open spaces ne sont pas encore majoritaires, mais ils progressent très vite car les nouvelles constructions adoptent toutes ce modèle d’aménagement » – Alain d’Iribarne.

Mais à l’instar du « bureau-paysager », l’open-space a ses limites et est très vite critiqué. Parfois qualifié « open stress » du fait des désagréments possibles (bruits, odeurs de repas, sonneries, le sentiment de surveillance…) ce type d’aménagement n’est pas accepté à 100%.

Les Français veulent des aménagements qui permettent de lever les critiques majoritairement faites aux open spaces classiques : trop de bruits et de difficultés pour se concentrer. La dernière crise sanitaire a fait prendre conscience de l’importance de l’aménagement des espaces bureaux et a montré qu’ils ne se limitaient pas à un baby-foot ou de grandes plantes. Les salariés ayant été forcés de travailler chez eux ont pris goût au télétravail dans un cadre agréable qui nous ressemble, sans avoir à se déplacer. Pour certains il a été difficile de revenir sur site où la possibilité d’être peut-être rapidement dérangés par les autres est présente.

Comment se réapproprier les espaces de travail et en faire des lieux de rencontres et d’échanges où les collaborateurs prennent PLAISIR à venir ? telle est la question !

Le bureau comme lieu de vie, comme « lifestyle »

À partir des années 1990, la culture managériale évolue et entérine des principes organisationnels selon lesquels la transversalité des échanges professionnels et le bien-être au travail sont considérés comme gage de la réussite d’une entreprise.

Une des principales solutions pour satisfaire les collaborateurs a été l’idée qu’il faut lier plaisir professionnel et personnel. Le principe de bureau comme lieu de vie émerge et la frontière entre l’individuel et le collectif se brouille, celle personnelle et professionnelle également, mais aussi celle entre temps de repos et d’activité.

Les partenariats entre scientifiques du travail ou architectes, agents immobiliers sont de plus en plus courant. Ces derniers agissent à la fois comme des révélateurs d’une culture managériale transformée mais aussi comme des conditionneurs ou des déclencheurs de transformation par les espaces qu’ils conçoivent. 

De plus en plus, le travail ne se réduit pas à un espace de travail et se conçoit davantage comme une expérience, un “lifestyle”. Les aménageurs d’espace de bureau réhabilitent des espaces en utilisant la méthode de l’office staging avec la création de lieux de rencontre informels et d’échanges riches, ce qui est indispensable pour une entreprise car, comme le disait Alain d’Iribarne, « si les gens ne se connaissent pas, ne se comprennent pas, n’ont pas envie de travailler ensemble, le travail collectif ne fonctionne pas. Il faut restaurer la valeur du travail informel. »  En ajustant les open-space avec la création de bulles individuelles de travail par exemple. On le voit chez Google, Facebook et autres. Ces bureaux en open space innovants, colorés au design planifiés et conçus de manière si complète donnent envie aux salariés de rester.

L’expérience collaborateur au centre

Dans ses récentes recherches en psychologie positive, Thomas Gilovich, professeur de psychologie à l’Université́ de Cornell, constate que “l’individu se résume par ses expériences ». En effet, l’individu s’habitue aux choses, les expériences, quant à̀ elles, s’avèrent plus signifiantes et plus épanouissantes que l’accumulation de biens matériels. Les expériences, et non la possession, font parties de l’individu.

Désormais, les individus ne veulent plus seulement posséder mais expérimenter. En ce sens, un collaborateur sera plus prompt à̀ vivre une véritable expérience dans son espace de travail qu’à apprécier une accumulation de biens compris comme décoratifs. C’est ce qu’on appelle « Employee Experience », l’idée que pour satisfaire ses clients et leurs offrir une expérience unique, l’entreprise doit avant tout offrir une expérience unique et exceptionnelle à ses collaborateurs.

Vineet Nayar, expert des technologies de l’information et du management d’entreprise, aborde cette notion dans son ouvrage « Employees First, Customers Second » (2010) où il démontre qu’ancrer l’expérience collaborateur dans les enjeux d’une entreprise est bénéfique tant pour l’entreprise que pour les salariés. En mettant toute l’entreprise au service de ceux qui créent de la valeur, Vineet Nayar a triplé, en moins de quatre ans, les bénéfices de HCL Technologies et multiplié le nombre de clients par cinq. Parallèlement, la satisfaction de ses collaborateurs a augmenté de 70%, ce qui découle sur une rétention des talents.

L’expériences collaborateur indissociable de l’expérience

En France, le terme «expérience collaborateur » est plus récent. C’est Corinne Samama qui le formalise pour la première fois en 2017 dans son ouvrage “L’Expérience Collaborateur : Faites de vos employés les 1ers fans de l’entreprise !“ L’idée principale repose sur une « symétrie de l’attention » entre le client et le collaborateur.

C’est en prenant soin de ses collaborateurs que l’entreprise pourra mieux servir ses clients, et devenir une “entreprise magnétique” apte à̀ attirer et fidéliser les meilleurs clients et collaborateurs. Cela désigne ainsi l’ensemble des interactions et expériences vécues par un collaborateur au sein de son organisation, tout au long de son quotidien et parcours professionnel.

Ce collaborateur peut être salarié et au sens plus large, un travailleur indépendant ou un partenaire de l’organisation. Corinne Samama, propose une vision globale de l’expérience collaborateur articulée autour de trois dimensions :

  • Une expérience émotionnelle
  • Une expérience relationnelle
  • Une expérience fonctionnelle

En s’intéressant à̀ ce que ressent le collaborateur, aux vécus de ses interactions et aux moyens de faciliter son travail au quotidien. Les RH et responsables de com’interne sont alors invités à̀ offrir une réelle expérience et non seulement livrer des services. C’est dans ce sens que l’on voit des DRH devenir des « Chief Employee Experience Officier », c’est-à-dire directeur de l’expérience collaborateur.

Le bien-être, le bonheur et la sérénité au travail constituent désormais des attentes de plus en plus prégnantes dans le monde professionnel. Selon l’ANACT (2013)*, 8 salariés sur 10 estiment qu’une bonne qualité́ de vie au travail profite autant aux employés qu’à l’entreprise.  Le bonheur au travail a un impact positif sur la performance d’une entreprise et à 73 % sur l’image de leur entreprise.

Ce qu’il faut retenir :

La notion d’aménagement des espaces est en constante évolution depuis plus de 60 ans et suscite énormément de réflexion dans le monde professionnel. Pour les responsables de com’ interne, RSE, ou de Chief Employee Experience, l’aménagement des espaces et des espaces de travail est un aspect qu’il ne faut surtout pas négliger car elle permet de prendre soin et de fidéliser ses collaborateurs,  d’en acquérir de nouveaux, réussir son onboarding des nouveaux arrivants,  développer et faire rayonner sa marque employeur.

SOURCES :

https://www.fabriquespinoza.org/wp-content/uploads/Fabrique-Spinoza-Etude-V.-Final.pdf

https://zevillage.net/future-of-work/entretien-avec-alain-diribarne-sur-les-modes-de-vie-au-travail/?amp

https://journals.openedition.org/nrt/2860

https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/guide-qvt-2019.pdf
https://journals.openedition.org/nrt/2859

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